Les plantes sont-elles intelligentes ? Ont-elles des sentiments ? Une conscience ? La multiplication d’ouvrages sur cette thématique pousse il y a deux ans François Bernier à se pencher sur le sujet. A travers des conférences, ce professeur de biologie végétale à l’Université de Strasbourg souhaite mettre en garde le grand public sur certaines contre-vérités.
« Avant, c’est une question qui ne se posait pas. Cela faisait consensus que les plantes ne pensent pas… », raconte François Bernier. Le chercheur à l’Institut de biologie moléculaire des plantes (IBMP) et directeur de la Maison pour la science en Alsace observe depuis deux, trois ans, un intérêt pour l’intelligence des plantes, avec la sortie d’une série de livres sur le sujet, à l’image de La vie secrète des arbres.
Problème, si les ouvrages partent de faits scientifiques avérés, l’interprétation qui en est faite relève bien souvent de l’irrationnel selon notre chercheur. « Parfois, la vérité est détournée au profit de belles histoires. Le grand public est perdu face à toutes ces informations. Ça m’a interpellé en tant que scientifique. Les universitaires ont aussi cette fonction de rétablir la vérité », explique François Bernier qui, pour ce faire, réalise notamment des conférences sur le sujet.
Les plantes perçoivent les couleurs
« Par exemple, les plantes perçoivent la lumière et les couleurs, ce qui ne signifie pas qu’elles voient. Elles ressentent également les vibrations mais n’entendent pas la musique », détaille le chercheur, qui précise que les plantes peuvent sentir. « C’est un mécanisme utile à leur défense. En cas d’attaque, elles émettent un gaz qui "prévient" les autres plantes. Elles communiquent ainsi entre elles via des messages chimiques. »
Alors, les plantes sont-elles intelligentes ? « C’est une question de définition. Les plantes font plein de choses formidables mais c’est une adaptation à un milieu qui relève du réflexe, pas de l’intelligence au sens humain ou animal du terme. Aucune donnée ne permet d’affirmer que les plantes ont une conscience et ce caractère n’est pas nécessaire pour expliquer leurs propriétés », souligne le biologiste, qui met en garde contre l’anthropocentrisme.
« Vous leur parlez en quelle langue ? »
Inutile donc de s’inquiéter de la douleur que pourrait ressentir ce cher Bonzaï lorsque l’heure est venue de lui tailler les branches. « La douleur est une perception du cerveau. Aucune étude ne permet de dire actuellement que les plantes souffrent. Peut-être que nous le découvrirons dans vingt ans, mais j’en doute… »
Inutile aussi de susurrer des mots doux à sa plante verte pour la rassurer ou de lui caresser les feuilles. « Le toucher leur cause un stress qui, s’il est souvent renouvelé, peut conduire à leur mort. Concernant la parole, vous leur parlez en quelle langue ? », sourit François Bernier. « Il faut savoir que les plantes sont sur Terre depuis plus de 450 millions d’années, l’espèce humaine 300 000 ans… Il est dangereux de penser que la nature est là pour l’Homme. Les plantes n’ont pas évolué pour lui ! Pour moi, inutile de vouloir attribuer des caractères humains aux plantes, elles sont justement intéressantes parce qu’elles ne sont pas comme nous. »
Marion Riegert
- Pour aller plus loin, rendez-vous mercredi 27 novembre, à 18 h, amphithéâtre Maresquelle de l’Institut de botanique, 28 rue Goethe